LAVA est une association oeuvrant pour la réalisation de projets de développement de la commune rurale de Vohilava Manaptrana à Madagascar. L'ile connait la 5ème place des pays avec le plus grand nombre d'enfants descolarisés avec 76.2% de sa population vivant sous le seuil de la pauvreté et le peu d'initiative dans cette zone rurale est généralement l'oeuvre d'OSIM et d'organisations non gouvernementale. Lauréat PRA/OSIM 2019, l'association s'est donnée comme mission d'améliorer les conditions de scolarisation du village avec 3 nouvelles classes et une meilleure construction contre les intempéries. Le projet s'est construit autour d'un besoin significatif de la part des parents, enfants et enseignants face au manque de moyens et la capacité d'accueil de l'école risquant de mettre en péril la scolarisation de plus de 382 élèves et qui peut entrainer leur déscolarisation. Malgré la crise sanitaire liée à la covid-19, l'association LAVA a pu continuer ses travaux et a inauguré l'école le 18 aout 2020 avec différents représentants de la région dont le gouverneur de la province Farafangana ainsi que le maire de Vohilava
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COMMIUNIQUE.
Paris, le mercredi 23 septembre 2020 – Lors du Conseil des ministres de ce matin, le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales devait être présenté avant d’être transmis au Parlement. Coordination SUD dénonce un nouveau report incompréhensible alors que le monde fait face à un besoin urgent de solidarité internationale pour limiter les conséquences catastrophiques de la covid-19.
La pandémie actuelle entraîne des répercussions désastreuses dans tous les pays, notamment pour les populations les plus vulnérables dont le nombre risque de s’accroître, et plus particulièrement dans ceux en développement. Ce sont pourtant 100 millions de personnes qui sont aujourd’hui menacées de tomber dans l’extrême pauvreté et le nombre de décès liés à d’autres maladies comme le sida ou le paludisme risque de doubler dans l’année à venir, du fait des conséquences de la crise causée par la covid-19. S’y ajouteront les effets de la crise alimentaire, climatique et environnementale qui risquent d’être sans commune mesure. L’engagement de la France dans la coopération pour le développement doit s’intensifier et s’incarner à travers ce texte en l’inscrivant notamment dans la durée.
Coordination SUD et ses membres ont témoigné leur soutien à cette promesse de campagne d’Emmanuel Macron et ont partagé leurs recommandations afin que la future loi permette de renforcer cette politique de lutte contre la pauvreté et les inégalités. Toutefois, déjà repoussée fin 2019 puis à nouveau à deux reprises courant 2020, cette révision de la loi de 2014 est une fois de plus reportée sine die. Le processus de révision dure maintenant depuis 3 ans et l’échéance pour aboutir à un nouveau texte est déjà dépassée de 14 mois.
La future loi devait en effet fixer les orientations politiques et budgétaires essentielles pour traduire l’ambition et donner perspectives et lisibilité à la politique de développement solidaire. Il est temps d’engager le débat démocratique et de mobilisation citoyenne que cette politique mérite et que cette loi permet. Rappelons que 70 % des Français et Françaises sont favorables à un soutien aux pays en développement.
Emmanuel Macron déclarait hier lors de l’assemblée générale des Nations unies : « Nous devons penser les termes d'une mondialisation qui accepte de revenir et de repenser les termes d'une juste souveraineté et du juste échange ; qui intègre en son sein, au cœur de son modèle, la lutte contre les inégalités sous toutes leurs formes, qu'elles soient de genre, de conditions ou économiques, la lutte contre le réchauffement climatique et pour la biodiversité, et qui permette de manière durable d'intégrer les conditions d'un nouvel équilibre du monde ». Le futur projet de loi doit incarner cette ambition. Sa présentation en Conseil des ministres ne doit pas davantage être retardée et permettre au Parlement de se saisir du texte.
Coordination SUD et ses membres appellent à une reprise urgente de ce processus primordial et de ne pas trahir les promesses de solidarité avec les populations les plus vulnérables de la planète à un moment où elles ont particulièrement besoin.
Réalisées dans le cadre du programme « Made – Afrique de l’Ouest : Pour une gouvernance des mobilités basées sur les droits » le FORIM et ses partenaires issues des diasporas burkinabè et togolaises, ces feuilles de route portent un diagnostic sur les progrès accomplis et les obstacles qui limitent la capacité d’intervention et l’impact des diasporas dans leurs pays d’origine en Afrique de l’Ouest. Elles présentent également des pistes concrètes de renforcement pour l’ensemble des parties prenantes, des OSIM aux autorités nationales en passant par les structures d’accompagnement, le secteur privé et les organisations internationales. Issues d’un travail de 3 ans au sein d’espaces de concertations multi-acteurs, ces recommandations reflètent la volonté partagée d’améliorer les cadres d’engagement des diasporas, et de développer des outils innovants de coopération entre société civile, ici et là-bas, et autorités.
Alors que chacun.e aspire à une vie pacifique et digne, les crises et les conflits rythment l'histoire de l'humanité et ce, toujours en 2020. Il est encore possible - et urgent - d'imaginer un développement de nos sociétés où la paix soit l'état normal, et non cette période de calme entre deux guerres. Construire un monde de paix doit donc s'interroger sur les mécanismes en jeu, les conditions nécessaires à mettre en œuvre et sur les espaces d'action possibles. Cette analyse est pertinente et pertinente dans le contexte de la Covid-19, cette pandémie mondiale bouleversant de manière considérable le fonctionnement de nos sociétés, du local au global.
Sous le patronage de la Commission nationale française de l'UNESCO, le Département de la Seine-Saint-Denis a ainsi le plaisir de vous proposer une série de 3 débats en visio ou audio-conférence. Organisés entre le 21 et le 25 septembre et convoquant de nombreux experts et acteurs, ces débats s'attacheront à analyser et tracer des pistes pour construire un monde de paix, que cela soit à l'échelle de la planète ou du quartier où nous vivons .
Des relations entre Etats, en passant par les enjeux climatiques, ceux des inégalités territoriales, des violences policières ou de la lutte contre les violences faites aux femmes, cette série de 3 débats vise à donc interroger de nombreux aspects de ce qui devrait construire une société de paix.
Le FORIM interviendra au 1er débat d'un cycle d'événements en ligne, dans l'objectif d'interroger le rôle que peuvent jouer les diasporas pour construire un monde pacifique :
LUNDI 21 SEPTEMBRE 2020
18 H À 20 H
Débat # 1
« CONSTRUIRE UN MONDE DE PAIX DANS UN CONTEXTE POSTCOVID»
Inscription obligatoire et gratuite ici
Les relations internationales entre Etats sont soumises à des logiques de puissance, de compétitions et de conflits. L'histoire de l'humanité témoigne de ces logiques dont les populations sont les premières victimes. A l'inverse, des espaces de coopération existants concourant à ce que ces relations interviennent dans un monde pacifié. Pour le construire, l'ensemble de ces questionnements doivent absolument intégrer les enjeux liés au réchauffement climatique, qui structurera de plus en plus l'avenir du monde et de nos sociétés, là aussi, pour le meilleur ou pour le pire. La pandémie mondiale de Covid-19 a également mis en évidence d'interroger nos modèles de développement à l'échelle planétaire. Ce débat interrogera également le rôle que peut jouer la société civile pour construire un monde pacifique.
En présence de:
Débat animé par Roland Nivet , porte parole national du Mouvement de la paix et Pierangela Fontana , co-présidente de Non-violence XXI
Lien de pré-inscription
Pour tout contact, renseignement ou rejoindre le Réseau des acteurs de la culture de la paix et de la non-violence:
Nicolas Boureaumaux
Conseil départemental Seine Saint Denis
www.vialemonde93.net
Le premier cas de Covid19 a été signalé dans la ville de Wuhan (la capitale de la province du Hubei) date du 17 novembre 2019 en Chine. Le 22 janvier, le gouvernement chinois place sous quarantaine trois villes de la province de Hubei: Wuhan, Huanggang et Ezhou. D'autres villes comme Shanghai et Pékin sont également concernées.
Les autorités chinoises interdisent tout trafic aérien, ferroviaire,
routier et fluvial à destination et en provenance de ces trois agglomérations, à l'intérieur desquelles les transports publics (autobus, métro) sont également suspendus. Les autorités ordonnent également la fermeture des lieux publics de divertissement à l'instar des salles de cinémas, des salles de spectacle ou encore des cybercafés. Le port du masque est rendu obligatoire.
Le confinement est relativement strict et contrôlé. Aussi, deux hôpitaux de campagne sont construits de 25 000 m2 et pouvant accueillir jusqu'à mille patients et l’autre pour mille six cents patients. Alors que l’épidémie s’était fortement ralenti, une deuxième vague est annoncée en juin, touchant plus spécifiquement la ville de Pékin. La ville se reconfine après une augmentation de cas dans la ville, dû à une contamination dans un marché de gros.
La Chine est le pays le plus peuplé au monde, avec 1,4 milliard de personnes. C’est aussi le pays qui connait l’une des plus grande diaspora de la planète. Les Chinois d’outre-mer ont débuté leur émigration à la fin du 16ème siècle. Elle s’est intensifiée dans la deuxième partie du
19ème siècle et poursuivie jusque à l’époque contemporaine. Les Chinois d’outre-mer sont aujourd’hui présents sur tous les continents (Zhipeng Li, 2017[1]).
La communauté chinoise en France s’est formée par vagues successives de migrants venus à différentes époques et pour des raisons diverses. Elle est estimée à environ entre 600 000 à 700 000 personnes, soit la plus importante d'Europe. Elle est particulièrement concentrée en Ile de France et à Paris dans le 13ème arrondissement, plus souvent appelé le « quartier chinois ».
La crise de la Covid, en plus de malmener la santé des personnes, a été révélatrice d’une peur de l’Autre. Celui et celle, qui dans notre inconscient, a fait entrer l’épidémie en France est devenu indésirable. Pendant cette crise, la communauté chinoise a connu diverses formes de stigmatisations et de discriminations à son encontre, assimilant les Chinois.e.s de France directement au virus. Sur les réseaux sociaux, s’est développé le #Jenesuispasunvirus pour lutter contre cette stigmatisation. Deux personnalités de la société civile chinoise de France ont accepté de répondre à nos questions et nous apprennent d’une communauté, que nous ne connaissons que très peu. Nous les en remercions.
[1] Voir la thèse de Zhipeng Li « La diaspora Wenzhou en France et ses relations avec la Chine » : https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-01819716/document
Grâce Ly est écrivaine, autrice-réalisatrice, et animatrice de podcasts. Elle est née en France de parents chinois, installée en région parisienne depuis l’âge de 6 ans. Elle lance le blog La Petite Banane en 2011, puis crée une websérie Ça reste entre nous diffusée en 2017 et 2018. Elle discute particulièrement des questions d’identité, de racisme de culture.
En septembre 2018, elle crée le podcast bimensuel « Kiffe ta race », avec Rokhaya Diallo. Elle publie, à la même date « Jeune fille modèle » son premier roman chez Fayard. C’est pour elle l’occasion d’évoquer l’exil, les stéréotypes, la double culture, au travers de l’héroïne du livre, Chichi, une jeune asiatique de la seconde génération.
Sacha Lin Jung est de nationalité française, né à Paris issu d'une famille chinoise originaire de la ville Wenzhou. De formation scientifique, il profite néanmoins de la culture entrepreneuriale familiale pour se lancer dans de multiples activités commerciales en France et en Chine. Confronté tout au long de sa vie à des contrastes conflictuels, a germé en lui un besoin d'équilibre intérieur et d'harmonie extérieure. Il est le fondateur d’une association (« Jeunes Chinois de France ») afin de réunir des français d'origine chinoise dans le but de traiter des problématiques ainsi que des potentialités non exploitées relatives aux jeunes français asiatiques. C'est pour lui presque devenu une mission de vie. Lors de la crise sanitaire, il a été l’invité de nombreux plateaux de télévision pour apporter son éclairage en tant que membre actif de la société civile sur le débat du racisme anti-asiatique.
Propos recueillis par Chadia Arab, Jacques Ould Aoudia, et Benoit Mayaux
FORIM : Comment la communauté chinoise se structure-t-elle en France ? Pourriez-vous décrire cette diaspora peu connue ?
Sacha : La première chose à distinguer avant de commencer à parler de la «communauté chinoise» est que la «communauté chinoise» est devenu un amalgame de l'imaginaire collectif qui regroupe des communautés hétérogènes. Dans cette imaginaire collectif, les populations asiatiques font malgré elles aussi partie de cette communauté chinoise. Le seul point commun qui fait vraiment consensus au sein des populations asiatiques est la discrimination au faciès. C'est pourquoi dans la lutte contre les discriminations, nous parlons presque exclusivement de communauté asiatique au lieu de chinoise. Ceci étant posé, on peut distinguer deux courants migratoires qui ont déterminé la composition de la communauté dite chinoise en France: La plus connue est essentiellement basée dans le13eme arrondissement de Paris et a démarré à la fin des années 60, composée de populations asiatiques d'anciennes colonies françaises en Indochine (Vietnam, Cambodge, Laos principalement) qu'on appelle communément les «Boat people». Ces ressortissants de nationalité diverses ont souvent des origines chinoises, l'amalgame de qualifier tous les asiatiques de «chinois» n'est pas causée par la seule méconnaissance, le fait sociologique atteste parfois d'un réel amalgame culturel. L'autre courant migratoire moins connue, est pourtant plus ancien et plus important en terme démographique, représentant près de la moitié de la population chinoise en France est originaire de Chine continentale et son installation en France remonte à la Première Guerre Mondiale. À cette époque, la France et l'Angleterre passent un accord avec le gouvernement chinois de l'époque pour recruter 140 000 travailleurs chinois dont certains, quelques milliers vont finir par s'installer définitivement en France, et notamment à Paris près de la gare de Lyon et dans le 3eme arrondissement de Paris dès 1919. Beaucoup de ces Chinois sont originaires de la région de Wenzhou (ancienne concession étrangère). Cet ilot chinois en plein cœur de Paris restera marginal jusqu'à la fin des années 60 où la Révolution Culturelle en Chine engendre une fuite des Chinois vers de plus verts pâturages. C'est donc en concomitance avec les fameux «boat people», que se développe une migration plus discrète de Chinois de la région de Wenzhou qui, contrairement aux «boat people», n'ont jamais eu de contacts culturels avec la France. Ces deux courants d'immigration représentent la très grande majorité de la population chinoise en France. En marge, on compte bien entendu une présence d'étudiants chinois et une population en provenance de la région du Dongbei au nord-est de la Chine arrivée dans les années 90.n Chaque groupe a ses spécificités culturelles distinctes, ne parlent pas les mêmes langues et dialectes, se développe indépendamment dans des secteurs économiques très différents et possède son propre réseau communautaire et associatif.
En complément de ce tableau non exhaustif, il faut parler d'une population assimilée à chinoise mais qui ne rentrent pas dans les statistiques, celle des français d'origine asiatique issu des différentes courants d'immigrations que l'on voit émerger dans des actions de lutte contre les discriminations ou pour une meilleure représentativité politique. Cette conscience citoyenne est encore très récente et il n'existe aucune étude sur cette population de nationalité française qui commence à s'affirmer de différentes manières.
Grâce : Il serait plus juste de parler des communautés chinoises en France, parce qu’il y a de nombreuses migrations et de nombreux parcours. La Chine est évidemment un grand pays, 17 fois la France. Et donc les immigrations successives ne se ressemblent pas. Il y a par exemple, une immigration de Chine qui date des évènements Tian’anmen[1] de 1989, qui est très politique. Il y a aussi des étudiants chinois qui restent en France et qui s‘installent, il y a des migrations clandestines, des territoires du Dongbei au Nord de la Chine, une immigration qui vient de Wenzhou avec qui la France a tissé beaucoup de liens. Il y a aussi les Chinois qui sont issus des diasporas indochinoises, d’Ex-Indochine française, donc du Cambodge, du Laos et du Viet Nam et qui sont souvent confondus avec ces populations sous le nom de boat people par exemple.
[1] Le 15 avril 1989 débute un mouvement d'étudiants, d'intellectuels et d'ouvriers chinois qui dénoncent la corruption dans la classe politique chinoise et réclament des réformes politiques et démocratiques. Cette contestation, d'abord joyeuse et toujours non violente, se termine par l'intervention de l'armée (Source : France Info).
FORIM : L'épidémie de la Covid19 a débuté en Chine, quels impacts cette crise sanitaire a-t-elle eu en France? Et particulièrement sur la communauté chinoise de France? (racisme? Discriminations ? Autres ?, etc.)
Sacha : Pour les personnes sensibles au contexte de protectionnisme européen et de guerre économique entre les USA et la Chine, le fait que l'épidémie de coronavirus ait débuté en Chine a tout de suite été pris très au sérieux sur le plan sanitaire mais encore plus sur le plan des discriminations. C'est ainsi que les défilés traditionnels du nouvel an chinois en France ont été annulés afin d'éviter tout risque d'exposer les plus jeunes participants à d'éventuels débordements racistes auxquels nous assistions déjà sur les réseaux sociaux et dans la vraie vie. Sur le plan économique, dès le mois de janvier 2020, les commerces de bouche tenus par des asiatiques ont subi une baisse de fréquentation. Le secteur très important du tourisme s'est totalement arrêté. Sur les réseaux sociaux, les propos racistes à l'encontre de la communauté asiatique a explosé de plus de 900%. Sur le plan social, cette crise a mis en évidence le manque de préparation de la société française à faire face à une épidémie. Et donc au sentiment d'injustice des populations d'origine asiatique et malgré tout la suspicion qui a pu être exprimée à l'encontre de la gestion de la crise en Chine, subsiste quand même la conscience que l'Asie notamment la Chine est moins sous-développée qu'on aurait pu le penser. Ce qui peut générer un sentiment compensatoire de fierté au milieu de cette débâcle.
Grâce : Depuis le début de la crise sanitaire en Chine, c’est-à-dire à peu près vers le 20 janvier, date du nouvel an chinois en Chine, il y a eu un début de stigmatisation parce qu’on a projeté sur la population chinoise, les asiatiques d’une manière générale, et donc pas que chinoise, les personnes qui sont perçues comme étant asiatiques, aussi Vietnamiens, aussi d’autres groupes qui ne sont spécifiquement chinois mais qui sont perçues comme asiatiques. Donc des stigmatisations, des discriminations, des violences verbales et aussi physiques. L’épidémie du Covid19 a non seulement été une épidémie sanitaire, mais aussi un reflet des tensions sociales et de la montée du racisme anti-asiatique soudain. C’était une montée soudaine et très circonstanciée, et c’est quelque chose qui n’est pas nouveau en France. Il y a toujours eu du racisme anti-asiatique. En dehors de la crise sanitaire, c’était quelque chose de beaucoup plus insidieux, beaucoup plus invisible. On parle souvent de stéréotype qu’on dit positif. On dit souvent la communauté asiatique, chinoise, qu’on trouverait modèle, qui serait discrète et qui travaillerait dur, qui serait composée de « bons immigrés ». C’est souvent l’image qui colle à la peau aux personnes migrantes asiatiques et même des populations françaises aux origines asiatiques. Ce racisme qu’on dit positif, bienveillant mais qui demeure tout de même du racisme, s’est transformé en ostracisation, en violence franche, depuis le début de la crise sanitaire et ça a perduré aujourd’hui encore.
FORIM : Y'a-t-il un racisme particulier par rapport au Chinois et en comparaison aux autres communautés? Y'a-t-il une convergence des luttes? Nous pensons plus spécifiquement aux manifestations contre les violences policières. Est-ce que les Chinois.es de France se sentent concerné.es ? Comment les Chinois s'inscrivent dans ces luttes? Comment palier au racisme anti-chinois?
Sacha : Les noirs, les juifs, les maghrébins et les asiatiques ne souffrent évidemment pas des mêmes suspicions. Le racisme dont souffre les «Chinois» s'articulent sur des clichés effectivement spécifiques. Hormis le racisme ordinaire des clichés positifs ou réducteurs, le racisme anti-chinois se manifeste aussi par le phénomène d'agressions ciblées visant surtout les femmes et les personnes perçues comme les plus vulnérables.
Le racisme anti-chinois est donc présent sous deux formes, l'une est le racisme dit ordinaire et l'autre est un racisme lié à un ressentiment à l'encontre d'une image préconçue de la Chine. Dans les théories du complot, tout le monde peut trouver une raison de haïr «les Chinois», la consommation de viande de chiens, le traitement des musulmans du Xinjiang, la menace pour les démocraties occidentales, toutes ces accusations suffisent à construire un imaginaire collectif ou le «chinois» est l'ennemi. Dans ce contexte de dénonciation des violences policières, les populations chinoises ne se sont que très peu positionnés officiellement même si l'affaire LIU SHAOYAO, père abattu à son domicile à Paris devant ses enfants a été le motif d'un soulèvement contre les violences policières. Le racisme anti-chinois est lié à l'image de la Chine véhiculée dans les grands média occidentaux, la lutte contre ce racisme consisterait avant tout à détricoter les mythes anxiogènes sur la Chine qui masquent les points de convergence de l'histoire de la Chine avec le reste du monde. D'ailleurs je constate que depuis la dernière flambée de racisme anti-chinois, le nombre de militants indépendants appliqués à ce travail titanesque sont de plus en plus nombreux.
Grâce : Je ne pense pas qu’il y ait un racisme particulier contre les chinois, de manière interindividuelle, car c’est difficile de distinguer une personne chinoise d’une autre personne asiatique : je ne suis pas ciblée en tant que cambodgienne ou chinoise, je suis ciblée en tant qu’asiatique, avec un faciès, une forme d’yeux, de cheveux, qu’on associe à tout un continent, ce qui par ailleurs est de l’ordre du fantasme. Il y a en revanche du China bashing, qui vise les ressortissants chinois, et l’image de la Chine dans les médias. Le made in China c’est cheap, la Chine ne respecte pas les droits humains, etc. Certaines sont vérifiées, d’autres non. En tout cas, on remarque un emploi de vocabulaire qui est généralement négatif quand on parle de la Chine, et c’est une forme de racisme. Il se génère au niveau institutionnel, politique, de la recherche, et se diffuse ensuite dans la société française.
Il y a des convergences des luttes : la lutte contre le sexisme touche les femmes asiatiques, qui le subissent quotidiennement. L’antiracisme aussi fait partie de cette convergence. Les violences policières sont une lutte partagée. Les enfants de Liu Shaoyao ont monté un groupe de soutien pour demander justice pour leur père. En tant que franco-chinoise, je me sens concernée par ces faits de société, et cette prise de conscience en France. Ces revendications, ces demandes, ces manifestations pour la justice de Liu Shaoyao s’inscrivent dans un contexte plus large contre les violences systémiques.
Concernant la lutte contre le racisme anti-asiatique, je pense que la réponse pour faire progresser la société française peut être, à mon sens, la même que pour le sexisme ou pour toutes les formes d’oppression. Toutes ces formes d’oppression sont aujourd’hui régulièrement dénoncées et pour lesquelles on cherche à la fois un appui institutionnel et une médiatisation, une prise de conscience, une sensibilisation et un travail éducatif auprès de la population.
Lutter contre le racisme, c’est à la fois dénoncer ceux qui le pratiquent. C’est demander à nos institutions, aux personnes qui nous représentent, d’en faire une priorité dans les politiques publiques, de l’inscrire dans les programmes de l’Education Nationale. Mais aussi c’est rendre responsables ceux qui se rendraient coupables de racisme et qu’il y ait des réparations. C’est une réponse qui est globale. Qui peut se faire pour toute sorte d’oppression.
FORIM : Quels liens entre les Chinois de France et le pays d'origine?
Sacha : J'ai toujours observé que les Chinois de France de même que les Français d'origine chinoise étaient tournés vers la France plutôt que la Chine, peu sont ceux de la deuxième génération à garder des liens effectifs avec la Chine. Mais l'apparition d'une forme de sentiment anti-chinois pousse de plus en plus les Chinois de France à se tourner vers leur pays d'origine et à se réapproprier cette culture qui constitue à la fois un atout sur le plan professionnel mais aussi un éventuel refuge par rapport au spectre d'un échec social en France.
Grâce : En ce qui concerne mon lien avec mon pays d’origine, je suis Chinoise du Cambodge. Donc je suis à la fois Chinoise, et mes parents viennent de Chine. C’est-à-dire qu’il sont nés au Cambodge dans une communauté, une famille chinoise. Ma mère est Cantonaise, mon père est Teochew.
Mon lien avec mon pays d’origine ? Je fais des voyages touristiques. J’ai de la famille qui a pu se réinstaller dans ces territoires [chinois]. Moi, personnellement, je ne travaille pas avec ces territoires. Je ne suis pas activement liée au pays d’origine. Mais j’ai une grande fascination pour sa culture, et pour mon héritage. Je ne pourrai pas, bien sûr, répondre au nom des Chinois de France. Je n’ai pas de mandat pour parler en leur nom.
FORIM : Enfin, comment voyez-vous le "monde de demain"?
Sacha : Pendant le confinement, chacun s'est mis à imaginer «le monde d'après». Je n'ai pas attendu pour œuvrer à un monde de Paix et de compréhension entre les peuples. Mais comment se comprendre séparés par des écrans de smartphones, séparés par la distanciation sociale, la suspicion et les restrictions de voyage?
La crise du Covid-19 a mis en suspens les interactions sociales, le temps d'aujourd'hui est celui de la remise en question de nos sociétés et de la refonte de nos acquis et certitudes. Je vois le monde de demain bien partagé entre ceux qui auront su construire des fondations humaines solides qui leur permettront d'apprendre, de comprendre, de transmettre dans un monde meilleur qu'ils auront eux-mêmes créé et ceux qui s'enliseront dans des problématiques non résolues du passé, incapable de se projeter dans le monde de demain.
Il est difficile de lancer un pronostic sur le monde de demain mais toute crise à deux faces, d'un côté le danger de destruction et de l'autre l'opportunité de se renouveler, d'évoluer, de s'entraider. J'espère que celles et ceux qui liront ces lignes seront convaincus que le monde de demain se construira sur nos prières d'aujourd'hui, puissent-elles rapprocher les gens et consolider la Paix entre les différents peuples.
Grace : Le monde de demain ? En fait, il n’y en a pas ! C’est le monde d’aujourd’hui. On fait aujourd’hui notre monde, chaque jour. Le monde d’aujourd’hui, celui qui se profile, c’est un monde où il n’est plus possible de mépriser les autres. On le voit grâce aux mobilisations, à l’organisation des personnes qui sont les premières concernées par les oppressions comme les femmes, comme ceux qui souffrent de racisme, ceux qui sont victimes des violences policières. Il y a des mobilisations, il y a dans l’espace public des revendications fortes de ces personnes et toute la société pourrait en bénéficier puisque cela ne concerne pas qu’une seule personne.
Le monde d’aujourd’hui se construit tous les jours. Je vois depuis la fin du confinement notamment, une présence sur les réseaux sociaux mais aussi dans la rue de beaucoup de personnes qui demandent à être entendues et être respectées dans leur singularité. Et ces voix ne sont pas forcément entendues, mais j’ai bien l’impression qu’elles ne vont pas cesser de se faire entendre avant d’obtenir de la part des personnes qui nous représentent dans les institutions de gouvernance de la France, d’être considérées et de faire avancer ce qui doit l’être.
Chronique rédigée par Chadia Arab, Jacques Ould Aoudia, Benoit Mayaux
Comité de rédaction : Chadia Arab, Benoit Mayaux, Jacques Ould Aoudia, Patrick Rakotomalala
Mise en forme et communication : Randa Chekroun, Pierangela Fontana
Les propos contenus dans la présente publication n’engagent que leurs auteur.e.s
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Le programme Co-développement Mali, connu également comme Programme Mobilité Migrations pour le Développement (P2MD) est né de la volonté de deux pays – le Mali et la France – de valoriser et de mobiliser davantage la diaspora malienne en faveur du développement du Mali à travers notamment l’accompagnement et le renforcement de ses interventions par un appui technique et/ou financier à ses projets. Le cœur de la démarche constitue le co-développement sur le double espace qui entend l’engagement de la diaspora malienne dans les pays d’accueil, d’une coté, et des acteurs et des populations locales à Mali qui sont des bénéficiaires directs et des porteurs des projets, de l’autre.
DATE d'ECHeANCE : 24 Juillet 2020
Dans le cadre du programme, la Cellule Technique du Co-Développement du Ministère des Maliens de l’Extérieur, lance un appel à projets visant à lutter contre la propagation du Covid-19 et à en atténuer les impacts économiques et sociaux. Le dispositif vise à accompagner les collectivités territoriales, les associations ou ONG maliennes en partenariat avec les associations de la diaspora malienne installées dans les pays de l’UE, de la CEDEAO et/ou de la CEMAC dans la réalisation de projets collectifs.
L'appel s'adresse aux associations de la Diaspora Malienne basées en France. Une condition est pré-requise aux projets candidats avant la soumission : création d’un partenariat entre l’association de la diaspora malienne et le porteur local, où l’association de la diaspora se porte en tant que partenaire du projet et le porteur figure en tant que maître d’ouvrage principal.Les projets retenus devront être mis en œuvre sur une période maximale de 9 mois après leur sélection.
L’enveloppe globale mise à disposition pour cet appel à projets est de 300 000 000 FCFA. Toute subvention octroyée à une action dans le cadre du présent appel à propositions doit être comprise entre un montant minimum de 15 000 000 FCFA et maximum de 30 000 000 FCFA. La subvention octroyée dans le cadre du présent appel à propositions peut être de 100 % du total estimé des coûts éligibles de l'action les partenaires de la diaspora malienne sont invités à cofinancer l’action à hauteur minimum de 10% du total des coûts éligibles de l’action
1. Santé, hygiène et assainissement : réalisations d’infrastructures gérées collectivement (construction ou équipements de Centres de santé communautaire, adductions d’eau potable, achats de matériels de protection contre la propagation du Covid19, achats de médicaments, etc.) et acquisition de matériel destinés à promouvoir les gestes barrières, ou toute autre action visant à réduire la propagation et les effets du COVID-19.
2. Des projets structurants de sécurité alimentaire visant à soutenir la résilience des populations et l’autosuffisance alimentaire face aux crises et aux conséquences de l’épidémie COVID-19 pendant les périodes de soudure et de difficultés alimentaires (réalisations de banques de céréales et/ou dotations de celles-ci, réalisation des périmètres maraîchers ; dynamisation de filières productives agricoles et d’élevage).is
Les conditions d'éligibilité la procédure de dépôt de candidature et de sélection des projets, sont disponible ci-dessous.
#1 appel
#2 cahier de procédure
#3 fiche de candidature
#1 appel
#2 cahier de procédure
#3 fiche de candidature
présentation de l'appel Facilité 3
Mercredi 08 juillet 2020
de 17h à 19h
14, Passage Dubail 75010 Paris
La Tunisie est un pays de 11,5 millions d’habitants sur une superficie de 162 155 km2. Le pays a été relativement préservé par le Covid19, mais la crise sanitaire a impacté néanmoins d’autres secteurs du pays.
Officiellement, la pandémie de Covid-19 a commencé à se développer en Tunisie le 2 mars 2020. Rapidement, des mesures exceptionnelles ont été prises d’une manière progressive. En effet, le 9 mars, le conseil de sécurité national présidé par le président de la République Kaïs Saïed, a annoncé des mesures strictes telles que la limitation des transports avec l'Italie et la suspension des cours dans tous les établissements scolaires et universitaires. Le 13 mars, le chef du gouvernement annonce le passage au niveau 2 avec la suspension des prières collectives et l'annulation des congrès et des manifestations culturelles ainsi que la fermeture des cafés, restaurants à partir de 16 heures. Les frontières maritimes sont fermées et les liaisons aériennes interrompues avec l'Italie et limitées avec la France, l'Égypte, l'Espagne, le Royaume-Uni et l'Allemagne. Le gouvernement a décidé en plus l’isolement en quarantaine pendant 14 jours de toute personne entrant sur le territoire national.
Ensuite presque chaque jour des nouvelles mesures ont été prises comme la fermeture des frontières terrestres et aériennes, l'interdiction des rassemblements, la fermeture des souks et des hammams et la mise en place d'horaires restreints de travail pour certains salariés (travail administratif, entreprises privées, etc.) dès le 18 mars.
Le couvre-feu a été décrété à partir du 18 mars, de 18 heures à 6 heures, sur tout le territoire national et le 20 mars, le président de la République annonce dans une allocution télévisée un confinement total ainsi que l'interdiction de tous déplacements entre les agglomérations.
L'État débloque dans la foulée trois milliards de dinars (environ un milliard d'euros) afin de financer un plan d'aide pour soutenir les entreprises et les plus pauvres. Cependant, ces mesures apparaissent insuffisantes, notamment pour les plus pauvres et les travailleurs du secteur informel qui ne peuvent cesser le travail du jour au lendemain. Dans certaines villes, des habitants manifestent contre les autorités, malgré l'instauration du confinement, pour dénoncer le manque de nourriture.
À partir du 4 mai débute la première des trois phases de déconfinement progressif décrété par le gouvernement, qui planifie de redémarrer l'économie progressivement entre le 4 mai et le 14 juin, et ce en fonction de l'évolution de la pandémie dans le pays. Au 26 juin, on compte 1 164 cas de contaminations confirmés pour un total de 50 décès selon les sources du ministère de la Santé tunisien.
Plusieurs opérations ont eu lieu telles que l’installation d’un hôpital militaire dans le sud, la mise en place de tests rapides dans plusieurs gouvernorats, la mise en place d’autorisations de déplacement, l’utilisation de drones par le ministère de l’intérieur pour le contrôle des déplacements.
Ensuite une deuxième phase de déconfinement a commencé en juin avec par exemple l’ouverture des cafés dès le 4 juin en respectant les gestes barrières et les salles de fête dès le 14 juin, tout en respectant le protocole sanitaire établi par le ministère de la Santé. Le 8 juin, le président Saïed annonce la levée du couvre-feu.
Du 29 mars au 29 mai, l’état tunisien confirme le rapatriement de 25 000 ressortissants tunisiens environ dont 2/3 par voie aérienne et 1/3 par voie terrestre Plusieurs pays ont proposé des aides à la Tunisie comme le Qatar avec un hôpital itinérant, l’Allemagne et la France avec des dons d'équipements médicaux ou la Chine avec la venue de médecins chinois venus épauler leurs homologues tunisiens.
La crise sanitaire a été relativement maitrisée avec seulement 50 décès au total mais les autres aspects (économiques, sociaux, relations avec la diaspora…) n’ont pas fait l’unanimité.
Le secteur le plus touché est celui du tourisme qui selon la Banque centrale de Tunis, avec des pertes qui dépassent les 4 milliards de dinars tunisiens soit environ 1,3 milliards de dollars. Plus de 2500 entreprises sont touchées par la crise selon le ministre des finances.
Le 20 mai, le gouvernement annonce plusieurs mesures comme la mise en place d’une ligne de crédit de 500 millions de dinars tunisiens pour les établissements hôteliers pour payer les salaires.
Selon une étude, 430 000 emplois ont été perdus temporairement durant la crise du coronavirus. Et une baisse du PIB tunisien de 46,4 % durant le deuxième trimestre 2020.
Concernant les mesures économiques et sociales mises en place, plusieurs tâtonnements et maladresses ont provoqué la colère des tunisiens comme l’annonce d’aides pour certaines catégories de personnes qui a provoqué un grave problème de distribution dans les bureaux de poste ou la mise en place d’aides pour les entreprises à travers des liens internet qui ont mal été maitrisées.
Plusieurs programmes d’aides dans certaines régions ont été faits dans la précipitation et sans prendre en compte la réalité des catégories de personnes les plus démunies.
La Tunisie compte plus de 10% de ses nationaux à l’étranger. Et dès le début de la crise sanitaire cette diaspora a, à travers plusieurs associations et collectifs constitués pour l’occasion, répondu selon ses moyens aux conséquences de la pandémie. La majorité de la société civile a adhéré aux mesures prises par le gouvernement Tunisien et a adhéré à la politique de prévention qui visait à freiner fortement la propagation de la pandémie.
Dès le déclenchement de la crise, la CAITE (Coordination des associations de l’immigration des tunisiens à l’étranger) et d’autres groupements associatifs avaient invité toutes les associations des Tunisiens en Europe, à suspendre toutes leurs activités impliquant la présence du public ou leurs adhérents et appelés à participer, à leur niveau et dans leurs pays respectifs, à la lutte contre la propagation de l’épidémie du coronavirus.
L’Etat a mis en place une collecte internationale d’ampleur qui a réussi à réunir plusieurs milliards de dinars pour aider à équiper les hôpitaux et infrastructures hospitalières et la diaspora tunisienne y a contribué fortement.
Plusieurs autres collectes d’argent et de matériel ont vu le jour partout en Europe et dans le monde entier par des associations ou collectifs tunisiens pour venir en aide aux Tunisiens tant à l’étranger qu’en Tunisie. Certaines collectes avaient pour objectif une aide alimentaire d’urgence pour les familles démunies en Tunisie et d’autres pour aider les hôpitaux et centres hospitaliers tunisiens à s’équiper en matériel.
Certaines initiatives étaient mises en place au niveau national mais la plupart des collectes ont été mises en place par des groupes d’une même région d’origine pour venir en aide à leurs villes et villages.
Cette crise sanitaire a révélé l’absence criante de moyens matériels suffisants et d’équipements sanitaires publics dans les établissements tunisiens.
La diaspora tunisienne appelée TRE (Tunisiens résidents à l’étranger) a participé et aidé le pays durant la crise Covid-19 mais ceci a aussi mis en lumière un problème structurel du rôle mal compris et mal géré de cette diaspora par les gouvernements successifs.
En effet, la crise sanitaire du covid19 a eu pour conséquences des campagnes d’hostilité à l’égard de la diaspora et des mesures discriminatoires qui l’ont visé à travers une communication maladroite du gouvernement (différence entre cas dits « importés » et cas « locaux » pour chaque personne contaminée)
Et comme le dit monsieur Hédi CHENCHABI, militant associatif, « Malgré les avancées en termes de droits de vote et le changement de certaines pratiques de l’ancien régime, la Tunisie a du mal à mobiliser les richesses et les compétences de cette diaspora. L’opinion publique et certains médias continuent à véhiculer une image et des idées qui manifestent une méconnaissance des réalités de l’immigration, des TRE et de leurs droits à vivre dans l’égalité avec les autres nationaux. Et cette ressource inestimable que constituent les TRE n’est plus à démontrer. Comme le soulignent tous les indicateurs économiques, sociaux, culturels et humains. Maltraités par les gouvernements successifs et sous prétexte de Covid-19 importé par eux, les TRE se trouvent dans des situations critiques et discriminés par des propos hostiles, des attitudes vexatoires et la prise de mesures inacceptables concernant les frais consulaires et les restrictions et obligations diverses pour revenir au pays auprès de leurs proches. »
Les mesures discriminatoires, vexatoires et hostiles envers la diaspora ont été alimentées par certains médias et ont provoqué des campagnes néfastes des deux côtés : certains Tunisiens de l’intérieur ont lancé des campagnes pour interdire le retour de la diaspora au pays pour ne pas « contaminer les tunisiens de l’intérieur », et de l’autre côté plusieurs collectifs de la diaspora ont appelé à boycotter le retour au pays pour cette année.
Ainsi, plusieurs collectifs tel que celui des « Associatifs Tunisiens de l’étranger » ATE très actif avec plus de 40 associations en Europe a communiqué dans ce sens : « nous réfutons avec force et condamnons les allégations haineuses contre les Tunisiens résidents à l’étranger et rentrant en Tunisie, accusés d’importer et de disséminer le virus dans leur pays. Les tunisiens à l’étranger et surtout ceux qui résident en Europe sont victimes de la pandémie. Parmi eux, les migrants les plus fragiles (sans papiers, étudiants personnes isolés etc.…) ont besoin de notre solidarité et des actions spécifiques doivent être menées à leur égard. »
En plus de ces campagnes discriminatoires, une maladresse du gouvernement envers la diaspora s’est ajoutée à cela en augmentant d’une manière brusque les tarifs des opérations consulaires de 300% environ au tout début de la crise sanitaire.
Cette mesure a ravivé les doléances de plusieurs collectifs et membres de la société civile tunisienne à l’étranger qui ont exprimé et formulé plusieurs demandes aux gouvernements successifs depuis 2011, et restées toutes sans réponse.
Cette situation a permis de créer une dynamique entre associations et collectifs pour une meilleure prise de conscience de leur rôle dans le développement du pays et a permis aussi de réfléchir à une vraie refonte des politiques économiques, sociales, et fiscales applicables aux tunisiens résidents à l’étranger dans un souci d’égalité et tenant compte de l’évolution des usages et des nouvelles technologies.
Plusieurs collectifs ont exprimé leur souhait de voir le gouvernement tunisien, et plus particulièrement les départements ministériels et les administrations en liaison directe ou indirecte avec les Tunisiens résidents à l’étranger, à plus de concertation avec leurs représentants et avec la société civile à l’étranger et à plus d’efficacité dans les mesures et dispositions qui impactent les conditions de vie des Tunisiens à l’étranger.
Sociologue et philosophe, chercheur en philosophie sociale Laboratoire (Philab université de Tunis), auteur de ‘’ la société de résistance ‘’ (2019) et de sociologie des marges au temps du Coronavirus (2020)[1] ; membre fondateur et militant du FTDES (Forum Tunisien pour les droits économiques et sociaux ) , membre de l’association Nachaz
Propos recueillis par Chadia ARAB, Vice-Président FORIM, membre d’IDD
Question 1 : Quelle est la situation de la crise sanitaire en Tunisie et particulièrement pour les migrants ?
Entre l’annonce officielle du premier cas de Covid- 19 positif, en Tunisie le 2 mars 2020 et le 14 juin 2020 date du dé confinement officiel le bilan de la Tunisie est plus qu’honorable, malgré une infrastructure de santé publique modeste, et grâce à un cadre médical engagé et compétant la Tunisie a maîtrisé la pandémie. L’histoire nous renseignera sur les autres facteurs (climatiques, démographiques, ou se rapportant aux protocoles de vaccination propre au pays …) qui ont probablement aidé la Tunisie et toute l’Afrique à résister.
Le gouvernement, fraîchement installé le 26 février 2020, a affronté en un premier temps un attentat terroriste dans le nouveau quartier d’affaires du Lac, pas loin de l’ambassade américaine, visant un poste de police, s’est très vite converti en un gouvernement anti-covid. Et bien que l’usage de mot guerre a été inapproprié, on a vu la mise en place d’un plan gouvernemental visant à apporter les réponses nécessaires et urgentes aux différents problèmes et revendications que nécessite une crise sanitaire pareille, aussi bien auprès des couches sociales démunies qu’au entreprises.
En effet, une batterie de mesures économiques et sociales a été décidée par le gouvernement le 22 mars 2020 dont l’enveloppe totale a été estimée à 2.5 milliards de dinars. Une lecture globale de ces mesures met en évidence l’engagement social de l’Etat à protéger en premier lieu la vie et la santé des Tunisiens : fermeture des écoles, des mosquées et des frontières, confinement total de de deux mois et mise à l’arrêt de tout le pays.
Le montant comporte des dépenses à caractère social, telles que la mise en place d’un fonds exceptionnel pour les plus fragiles, doté de 150 millions de dinars. Une panoplie des dotations a été allouées aux PME et qui concernent le report de paiement des charges fiscales et sociales pour trois mois, tout en aboutissant à rééchelonner leurs dettes fiscales et sociales sur une période de 7 ans.
Un fonds d’investissement de 500 millions de dinars consacré à la capitalisation et à la restructuration des entreprises touchées par la crise a été mis en place, pour venir en aide aux entreprises partiellement exportatrices qui ont souffert immanquablement de l’impact de la crise mondiale. Les autorités publiques ont permis d’augmenter leur chiffre d’affaire sur le marché local de 30 à 50%, et jusqu’à 100% pour les entreprises exportatrices opérant dans le secteur de l’agroalimentaire.
La Banque centrale est intervenue, de son côté, en décidant de baisser le taux directeur de 100 points de base (qui passe ainsi de 7.75% à 6.75%) et de reporter de six mois le paiement des échéances de crédits bancaires pour les entreprises.
Il est indéniable que, globalement, la jeune démocratie Tunisienne en dépit d’une croissance faible en 2019, de la tension en Libye, pays voisin déchiré par la guerre, et des tiraillements qui divisent la classe politique et la coalition gouvernementale elle-même, a tiré son épingle du jeu face à la crise sanitaire. De quoi se réjouir, et on ne s’en privera pas. Le dynamisme qu’a montré la société civile, les nombreuses initiatives originales nourrissent, malgré le moment difficile, un certain optimisme.
Il n’empêche, cette réussite dans la gestion sanitaire n’a pas pu cacher la gravité de la crise économique et sociale que vit le pays et le débat parfois houleux entre économistes et acteurs politiques sur les programmes de sauvetage puis de relance adéquats et des voix s’élèvent pour une rupture avec les théories néolibérales orthodoxes désastreuses.
Q 2 : Quel travail avez-vous mener au sein du FTDES en soutien avec les migrants ?
Puisqu’il s’agit d’une crise sanitaire, en premier lieu, qui a mis à nu les inégalités sociales qui divisent, le pays rappelons que selon les données de l’OMS, l’espérance de vie à la naissance était de 76 ans en Tunisie en 2016. L’Esperance de vie en bonne santé est aujourd’hui de 66,3 ans, soit une perte de près de 10 ans en raisons d’incapacités temporaires ou permanentes et des conditions sanitaires et sociales. Bien sûr, la baisse de cette espérance de vie est plus forte chez les personnes pauvres.
Les indicateurs, en termes d’accès à l’eau potable, au système de santé, d’accouchement en milieu assisté, de malnutrition à la naissance de mortalité néonatale, de mortalité infantile, de proximité de centres de santé de qualité acceptable… expliquent aisément l’inégalité dans l’espérance de vie en bonne santé. Les personnes en situation d’inégalité en matière de santé sont de fait plus vulnérables en cas d’exposition au coronavirus comme l’a bien démontré l’économiste Azzam Mahjoub[1] dans une étude publiée récemment par le FTDES.
D’un point de vue sociologique la réalité vécue est douloureuse et les chiffres, désormais à la portée de tous, sont choquants : en plus des 700 000 chômeurs (un chiffre qui risque d’atteindre les 900 000 suite à la crise), il y a 285 000 familles démunies, 622 000 familles au revenu modeste ; 70 000 travailleurs de chantiers (emplois précaires dans le secteur public) ; 40% des 950 000 retraités perçoivent des pensions en dessous du SMIG. Ajoutons les dizaines de milliers d’ouvrières agricoles qui constituent 70% de la main-d’œuvre agricole.
Ces gens « d’en bas » que j’ai essayé de rendre visible à travers ma dernière publication, Sociologie des marges, ont fait irruption, à la faveur de la crise épidémique, dans le champ de vision des commentateurs et des décideurs. Hier encore, ils évoluaient dans la froideur opaque des chiffres, les voilà qui déboulent dans les rues, ou les points de distribution des produits de première nécessité. De l’invisibilité à l’hyper visibilité de crise. Il est primordial, pour notre démocratie, d’assurer les conditions de la banale visibilité de tout le spectre social. Ainsi l’idée selon laquelle les premiers concernés, c’est-à-dire les citoyens, doivent se voir accorder une place plus importante dans le débat public est à mes yeux d’une brûlante actualité, tant au niveau locale qu’à l’échelle mondiale.
Pour les migrants subsahariens, qui vivaient déjà avant la crise dans des conditions économiques incertaines. Voués à une double précarité psychologique (inhérente à l’illégalité du séjour) et sociale, ils vivent une double étrangeté : l’exil et le dénuement. La crise du coronavirus est venue bouleverser encore une existence fragile et des équilibres bricolés au jour le jour : l’organisation de fragments de communautés solidaires dans un environnement modérément hospitalier,
La crise a montré qu’il est temps de se pencher sur la question des migrants dans toute sa dimension : l’emploi précaire, le droit aléatoire au séjour… En un mot, la question de l’hospitalité qui doit être pensée non plus comme une question morale mais comme un impératif d’intégration sociale.
Quelques signes sont rassurants, aussi bien les Organisations non-gouvernementales (ONG) internationales à vocation humanitaire que les militants de la société civile tunisienne et les lanceurs d’alertes n’ont cessé d’attirer l’attention sur la situation des migrants et des réfugiés. Les décisions récentes du gouvernement et la collaboration entre le ministre des Droits de l’Homme et les collectifs associatifs pour venir en aide et organiser la solidarité avec les subsahariens sont de bon augure.
Reste la question du racisme. Question redoutable sur le double plan sociologique et anthropologique : la loi antiraciste est une avancée réelle, mais demeure insuffisante tant que le « rejet » des subsahariens demeure une banalité sociale. Il y a encore du chemin à faire.
En résumé tantôt déniées, tantôt reconnues par les gouvernants (incapables jusque-là d’apporter des réponses), les inégalités sociales et territoriales, la précarité et le mal être des invisibles, sont encore une fois dévoilées par cette crise. La fracture est monstre, la Tunisie pauvre souffre nous l’avons tous vu à l’œil nu. Il ne fallait pas un effort exceptionnel pour mettre sous les feux de la rampe la géographie sociale de la marginalisation. Aussi bien les régions de l’Intérieur, oubliées depuis des décennies, que les quartiers populaires qui ont constitué le territoire « privilégié » de la révolution et continuent aujourd’hui encore à être le terrain de prédilection de la parole et de l’action protestataire.
Les derniers chiffres dont nous disposons au FTDES, confirme que la capacité d’agir est encore vive : 1138 mouvements de protestation ont eu lieu durant les 100 premiers jours du nouveau gouvernement soit du (27 février au 5 juin 2020) malgré les mesures de confinement, 47,6 % des mouvements de protestation ont eu lieu dans la région du centre ouest (542). 331 mouvements ont eu lieu à Sidi Bouzid et 167 protestations ont été observées à Kairouan.
On se retrouve encore une fois face à un dilemme cornélien : d’un côté, des populations éloignées qui luttent pour l’accès à l’eau, pour la survie et la dignité ; de l’autre, un État qui, au nom de l’impératif sanitaire, demande aux habitants d’un bout à l’autre du pays, de respecter les mêmes directives administratives et sanitaires. Force est de constater que les directives institutionnelles uniformes achoppent sur la désobéissance des « sans-parts ». On retombe à chaque fois sur la même problématique : la reproduction de la domination et les politiques du mépris. C’est un confinement à deux vitesses : l’un observé dans l’inquiétude par les inclus l’autre subi et rude pour les exclus et les plus vulnérables.
La crise du coronavirus pourrait donc renforcer la dynamique de démocratisation déjà en cours depuis 2011, mais cette fois probablement loin de la bipolarisation identitaire. La constitution de la IIème République, issue d’un long débat, dans l’hémicycle comme dans la société civile, a entériné le caractère civil de l’État. Elle a également proclamé un État social, même si on y prête moins attention : 30 articles sur les 148 de la nouvelle loi fondamentale sont consacrés à détailler les droits économiques, sociaux et environnementaux. Cette constitution repose bien sur une plateforme propice à l’invention du « commun » et d’un nouveau contrat social.
La démocratie tunisienne, la seule qui persiste dans la région suite aux révoltes arabes de 2011 et la plus jeune démocratie au monde est de nouveau face à son destin : consolider les libertés et bâtir une société juste et lutter contre les inégalités criantes ou dépérir doucement.
Pour l’ONG Oxfam[2], le système fiscal tunisien pèse de manière démesurée sur les classes moyennes et pauvres au profit des plus aisés. Ce système est modelé par la vision néolibérale préconisée par les institutions financières internationales qui ont encouragé la libéralisation de l’économie tunisienne à travers de vastes plans d’ajustements structurels à partir des années 1980. Ces politiques de libéralisation consistent à faire prévaloir les impôts indirects et à alléger le coût du capital. Ce qui a encouragé le développement du secteur privé pour servir les plus aisés, au détriment de services publiques essentiels et de qualité accessibles à tous.
Le dernier rapport du PNUD[3] tire la sonnette d’alarme : les franges les plus impactées par le covid-19 sont les ouvriers, les chômeurs et autres inactifs qui subissent une détérioration importante de leurs revenus relativement aux autres catégories de ménages. Les inactifs et les chômeurs sont parmi les plus affectés par le choc sanitaire car, en plus de la hausse des prix, ils subiraient l’effet de la baisse des revenus de leurs proches (qui les entretiennent faute de couverture chômage). Il est à noter également, selon la même étude, que le taux de la pauvreté extrême augmenterait suite au choc introduit par le covid-19. Il passerait de 2,9% à 3,3% à l’échelle nationale. Il est donc important de noter que la pandémie du covid-19 augmenterait la pauvreté des catégories les plus démunies du fait de leur plus grande exposition, non seulement au risque sanitaire, mais également aux conséquences socio-économiques.
Le nouveau contexte est clair, il est maintenant urgent d’agir de manière concrète.
Q 3 : Dans votre dernier livre, vous proposez une réflexion sur les contextes social et politique de la post-Révolution, avec une société de résistance qui s'organise et des nouvelles formes d'engagement. Cette société peut-elle finalement résister à la crise économique, sociale voir politique qui risque de voir le jour ? Comme voyez-vous le monde d'après Covid?
A mes yeux, le moment 2011 est un événement historique majeur pour nous Tunisiens, Maghrébins, Musulmans et peuples de la région, il nous appelle à une réelle ‘’renaissance ‘’ qui ne peut se faire que dans un cadre de solidarité internationale et altermondialiste.
La « société de résistance » n’est en ce sens qu’une catégorie analytique qui tente de cerner ce que la transition politique tunisienne recèle de plus émancipateur. Le livre focalise sur cette effervescence de pratiques en dehors du champ de la politique institutionnelle, et parfois dans l’opposition aux processus politiques « d’en-haut » sans cacher la difficulté de marier la patience des concept et l’urgence d’agir. J’ai voulu souligner par cet essai l’empreinte du « moment 2011 », et l’appréhender comme un tournant démocratique et social avant tout. J’ai aussi voulu attirer l’attention sur cet univers de dynamiques dissidentes, qui ne peut être réductible à la catégorie de « société civile » classique.
Les mouvements de protestation post-2011, font toujours écho aux lames de fond portées par les colères populaires qui grondent depuis des années, bien avant 2011. Chez nous, chez nos voisins et de par le monde, les émeutes populaires continuent. Le libéralisme est en crise et il n’a pas de réponse pour la planète, pour les sociétés et pour le prétendu « choc des civilisations ». Un sentiment collectif est largement partagé mondialement : ‘’il est impossible de continuer à gouverner le monde et la planète ainsi’’.
Le cri de la société d’en bas qui a fait chuter dans notre pays la tête du régime retentit encore et toujours au fond de la population des oubliés : dans les « favelas », dans les régions, dans les lieux de travail, dans les stades et dans les espaces de contestation et à travers les différentes formes d’expressions artistiques « underground ». Il est porté par les jeunes qui développent leurs propres sociabilités politiques, ainsi que de nouvelles formes d’engagement spontanées, horizontales et distancées.
Une partie de cette jeunesse s’auto-immunise contre l’extrémisme violent, contre les tentations de prendre les embarcations de la mort et de partir. Elle résiste contre le désespoir et elle cherche désespéramment une gauche politique qui s’assume et qui résonne avec son cri. Elle ne la voit pas, hélas. Leurs désirs de persévérer dans l’action est salutaire.
Une multitude de mouvements de contestation est en train d’inscrire son combat dans un cadre légal, en faisant référence aux différents articles de la Constitution de 2014. La lutte pour le droit de manifestation, pour les libertés, pour les droits des femmes, pour l’accès à l’eau, à l’éducation, à la santé, au travail digne, à un environnement sain…, s’inscrivent déjà depuis 2014 dans un cadre référentiel citoyen et civil.
La notion d’économie de rente fait son entrée dans le débat public tunisien. Elle désigne la collusion entre le pouvoir politique et un cartel de familles qui contrôle l’activité économique.
L'impôt sur la fortune est aussi un sujet de débat comme arme de lutte contre les inégalités : une bonne partie du patrimoine privé qui ne sert pas à créer de richesse, des emplois doit être taxée au profit de la société toute entière.
La question de la dette en générale et de la dette extérieure en particulier est, de nouveau posée avec acuité : celle-ci est en effet passée de 40% du PIB en 2010 à près de 80% aujourd’hui. Les principales causes de cette augmentation sont le creusement du déficit budgétaire, lié au déficit commercial et la détérioration de la valeur du dinar. Négocier cette dette en temps de crise est une opportunité historique, ceci reposera avant tout sur une volonté nationale et un rapport de force politique. Plus question de se vanter être le bon élève des institutions internationales. Il faut se défendre, il y va de la survie de notre économie et de la prospérité de notre société.
D’autre initiatives qui dans le domaine agricole, dans la lutte contre la corruption ou la promotion de l’économie sociale et solidaire… voient le jour. Grâce aussi à cette société civile et à cette jeunesse habitée par « la puissance d’agir », qui ne lâchent rien, la société de résistance est bel et bien une réalité.
En bref, un réel désir intellectuel, social et citoyen de poser la question sociale anime des acteurs infatigables chez qui le souci de garder le souffle de la révolution demeure intact
Ce que j’ai entamé dans la Société de résistance, et que j’ai prolongé dans un contexte autre, dans la Société des marges, focalise sur une question centrale à savoir le devenir des couches les plus précaires, les familles de faibles revenus, les régions intérieures et les quartiers populaires d’une part et les mouvements qui les portent et les défendent.
Disons que le nouveau mot d’ordre est, de souligner le primat de la question sociale dans le débat politique qui accompagne notre transition démocratique. Nous le réaffirmons : il n’est pas d’intégration politique, ni de construction démocratique viable sans intégration sociale. Cette évidence qui est la raison d’être du FTDES et de son activité, se révèle aujourd’hui encore plus éclatante.
Plus que jamais, le droit à un travail digne, les droits à la santé, à l’enseignement, à tous les services publics sont devenus impératifs. Le développement des régions les plus pauvres, la sécurité et la souveraineté alimentaire, la sauvegarde du tissu économique national… sont les préconditions d’une intégration sociale véritable. Une intégration reposant sur la production de richesse, la justice, l’égalité des chances et la dignité de chacun. Tant que ces priorités seront occultées par les politiques économiques rivées sur les « grands équilibres » comptables et sourds aux aspirations des catégories et des territoires les plus démunis, la démocratie tunisienne restera boiteuse et fragile.
Au-delà de notre petit pays, toutes les lectures et analyses de la pandémie et des moyens d’y faire face, tout comme les projections de « l’après-crise », nous renforcent dans l’idée qu’une nouvelle séquence s’ouvre dans le combat des peuples et des classes les plus pauvres, de tous les damnés de la terre contre les oligarchies qui règnent sur l’économie mondiale et en monopolisent les bienfaits. Beaucoup de mouvements transnationaux, d’ONG, de syndicats, de mouvements politiques affutent déjà les argumentaires en attendant de mobiliser les gens pour la confrontation qui vient.
A nous aussi, Tunisiens et Maghrébins, de nous tenir prêts et de nous doter des moyens d’y contribuer. Les gens sont conscients de leurs droits ; ils sont prêts à les défendre… Reste à penser, à imaginer et à mettre en place le cadre, la feuille de route et à réunir les volontés pour entrer dans l’arène.
[1] -la Société de résistance, post islamisme, post bourguibisme, post marxisme ed Mots passants, Nahcaz 2019
-Sociologie des marges au Temps du Coronavirus trad de Hichem Andessemad ( FTDES ) juin 2020
[2] Ftdes. Pandemie-covid-19-en-tunisie-les-inegalites-les-vulnerabilites-a-la-pauvrete-et-au-chomage 2020
[3] Rapport OXFAM : Le système fiscal tunisien pénalise les classes moyennes juin 2020
[4] UNDP-TN-Impact-covid-sur-léconomie-tunisienne-2020
Chronique rédigée par Fayçal BENABDALLAH, président de la FTCR, Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives
Comité de rédaction : Chadia Arab, Benoit Mayaux, Jacques Ould Aoudia, Patrick Rakotomalala
Mise en forme et communication : Randa Chekroun, Pierangela Fontana
Les propos contenus dans la présente publication n’engagent que leurs auteur.e.s
Le défi mondial constitué par la pandémie de la COVID-19 est arrivé en Amérique Latine comme l’explique Sabine Grandadam du Courrier International du 29/05/2020 « Du Brésil à l’Équateur, en passant par le Pérou, le Mexique et le Nicaragua, la région est touchée de plein fouet par la contagion, qui s’est accélérée ces dernières semaines. L’inquiétude grandit, alors que certains chiffres avancés par les scientifiques sont effrayants ».
Situé au nord du subcontinent sud-américain, le Venezuela avec plus de 30 millions d’habitants et ses 916.445 km2 ne fait pas figure d’exception. Le pays, déjà submergé dans une crise politique, financière et sociale, est pratiquement à la merci de cette pandémie.
Un contexte politique controversé
Depuis l’an dernier le pays vie une situation politique inédite avec deux présidents au pouvoir. Suite aux élections de 2018, considérées comme frauduleuses par différents groupes politiques du pays et institutions internationales, et en vertu des articles 233, 333 et 350 de la Constitution du Venezuela ; l’Assemblée Nationale déclare la présidence de Nicolas Maduro illégitime et proclame en janvier 2019 le président de l’assemblée, Juan Guaidó, comme le président par intérim du pays jusqu’à la tenue d’élections transparentes. Il est reconnu par une soixantaine de pays, dont les États-Unis, l'intégralité du Groupe de Lima (hormis le Mexique), et la France, mais n'a pas de pouvoir réel car le
a ôté ses pouvoirs à l'Assemblée Nationale en créant une Assemblée constituante qui siège en parallèle, et qui est entièrement composée de membres du parti politique du gouvernement. Maduro, pour sa part, est reconnu notamment par la Chine, Cuba, l'Iran, le Mexique, la Russie et la Turquie. Il détient le pouvoir dans les faits, en grande partie, grâce au soutien de l'armée.
Cette bipolarité est le reflet de la grande rupture politique dans laquelle le pays est immergé depuis plusieurs années. Une situation où les accords politiques ne sont pas à l’ordre du jour et les manifestations réprimées par les forces de l’ordre sont fréquentes avec un solde important de prisonniers politiques. Cela a été dénoncé par le Haut conseil des droits de l’homme présidé par Michelle Bachelet, ancienne présidente du Chili[1].
[1] Le rapport du HCDH sur le Venezuela appelle à des mesures immédiates pour mettre fin aux graves violations des droits de l’homme et y remédier https://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=24788&LangID=F
De crise humanitaire à une situation d’urgence complexe
Depuis 2015, la crise que connait le Venezuela a des dimensions multiples : politique, sociale et économique. Elle se manifeste par la pénurie de nourriture et de médicaments, l’augmentation du taux de criminalité, l’essor de l’économie informelle, la faiblesse des institutions, l’exode massif et l’aggravation de la pauvreté.
En 2019, le Produit Intérieur Brut (PIB) par habitant s’est situé à 3 374 $US. On prévoit une baisse d’environ 20% en 2020. A noter que le PIB du pays en 2015 était de 10 568 US$ selon le Fonds Monétaire International. Une hyperinflation qui dépasse le 10.000.000% témoigne de l’effondrement de l’économie vénézuélienne.
L’inflation rend le panier alimentaire de base 25 fois plus cher que le salaire minimum, ce qui provoque la malnutrition dans la population vulnérable. 32% de la population est touché par la crise alimentaire nationale, rendant le Venezuela le pays avec la quatrième crise alimentaire du monde : sur les 18,5 millions de latino-américains qui souffrent de cette pénurie,. Plus de 50 seraient Vénézuéliens : 9.8 millions à l'intérieur du pays et 1.2 millions des migrants seulement résidant en Colombie et en Equateur[2][3]. Selon l’UNICEF, 6.3% des enfants vénézuéliens de moins de cinq ans souffrent de malnutrition aiguë.
Le déclin spectaculaire de la production agricole ainsi que les faits de corruption du Comité Local d’alimentation et de production (CLAP- principale politique gouvernementale sur ce domaine), ont empêché les communautés d’accéder à l’achat des denrées alimentaires. Des recherches réalisées par Transparency Venezuela indiquent que le secteur de l’alimentation, en grande partie sous domination militaire, a été utilisé à des fins de prosélytisme et de contrôle politique[4]
En ce qui concerne le secteur de la santé, la pénurie de matériel médical est alarmante : 90% des hôpitaux sont concernés. Les prix des médicaments, quand ils sont disponibles, sont exorbitants aux yeux d’un Vénézuélien disposant d’un salaire minimum. La coalition Codevida, qui regroupe de nombreuses associations de défense du droit à la santé, estime à 80% les pénuries de médicaments dans le pays[5], « conséquence : les épidémies de diphtérie et de rougeole se propagent, on assiste à des flambées de paludisme et de fièvre typhoïde ».[6]
Le programme de santé « Barrio Adentro » créé par l’ancien président Hugo Chavez avec la participation de médecins cubains afin d’assister les populations des bidonvilles, n’existe plus. La quasi-totalité des services d’urgences est en détresse ; plus de la moitié des blocs opératoires sont fermés ; le déficit des lits s’élève à 64% et la moitié des lits existantes sont hors service. L’effondrement des services publiques atteint de plein fouet les hôpitaux : 33% ne disposaient pas, en 2018, de générateurs d’électricité.
Si le pays dispose de beaucoup plus d’eau que nécessaire pour approvisionner l’ensemble de sa population, avec un territoire continental et maritime de 2 millions de km², le démantèlement de toute la structure institutionnelle et physique du secteur compromet la qualité des sources d’approvisionnement, et les processus de traitement et de potabilisation des eaux.[7] D’après un récent rapport de l’Observatoire vénézuélien des services publiques (OVSP), seulement 16.7% des ménages reçoivent l’eau de manière continue. La situation s’aggrave parce que le pays dépend énergétiquement du barrage Guri pour produire plus de 65% de l’électricité consommée dans le pays. Actuellement, 9 de ses 20 turbines sont endommagées et il n’y a aucun plan pour les réparer. Des coupures de courant de plus de 12 heures se produisent régulièrement sur une grande partie du territoire national.
[2] Codevida. 9.3 millions de Vénézuéliens sont en situation de crise alimentaire. 27/04/2020.
[3] Agence régionale pour l'agriculture et l'alimentation. Rapport mondial sur les crises alimentaires 2020
[4] Transparency International - Venezuela. Rapport : Quarantine, a convenient restraint? May 2020.
[5] Complex Humanitarian Emergency in Venezuela. Right to Health. National Report. September 2018
[6] https://www.secours-catholique.org/actualites/venezuela-la-crise-humanitaire-est-sans-precedent
[7] Complex Humanitarian Emergency in Venezuela. Right to Water. National Report. October 2018
Des Vénézulién.ne.s à Caracas remplissent leurs bidons d’eau comme ils le peuvent, PHOTOS : AFP / EFE
Enfin, le Venezuela reste l’un des pays ayant le plus grand nombre de morts violentes dans la région et dans le monde, avec une estimation en 2019 d’au moins 16 506 morts et un taux de 60,3 morts violentes pour 100.000 habitants, suivi par El Salvador avec un taux de 48 morts. Les exécutions extrajudiciaires sont devenues un facteur important dans la reproduction de la violence dans le pays[1] : entre 2012 et 2019 ont été rapportés 10 970 exécutions extrajudiciaires et on comptabilise 357 durant le premier trimestre de 2020[2].
Ces circonstances ont déclenché une émigration massive des Vénézuéliens. Selon le Haute commissariat des Nations unies pour les réfugiés, environ 5 millions de personnes sur les 31 millions d’habitants ont fui le Venezuela depuis 2016. L’ONU estime qu’il s’agit du déplacement de personnes le plus important de l’histoire récente de l’Amérique latine[3]. L’exode vénézuélien est au deuxième rang mondial, après celui des Syriens alors que le pays n’est pas dans une situation de guerre ou de désastre naturel.
[1] Observatoire national des violences. https://observatoriodeviolencia.org.ve/news/informe-anual-de-violencia-2019/
[2] COFAVIC. ONG contre la torture. https://cofavic.org/wp-content/uploads/2020/05/Informe-Venezuela-enemigos-internos_2020.pdf
[3] https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/02/08/fin-2019-un-venezuelien-sur-six-aura-quitte-son-pays_5421099_4355770.html
Tous ces éléments ont généré une « situation d’urgence humanitaire complexe » (UHC) dans le pays. Telle situation est définie « comme une crise humanitaire grave, qui est le résultat d’une combinaison d’instabilité politique, de conflits et de violence, d’inégalités sociales et d’une pauvreté sous-jacente »[1], reconnue par l’ONU et ses divers services, dont le Bureau de la coordination des affaires humanitaires et le Programme Alimentaire Mondial.
A la profonde crise économique, politique et sociale décrite précédemment un manque d’accès au carburant, déjà fréquent avant la pandémie s’est aggravée depuis le mois de mars, alors que le Venezuela dispose des plus grandes réserves de pétrole connues au monde. Le pays ne produit plus que le cinquième de son volume d’il y a dix ans, d’après l’OPEP. Ceci s’explique par la corruption et la décision du gouvernement de ne plus investir dans l’industrie pétrolière. Cela a pour conséquence un grand déséquilibre entre la consommation interne et la production, ce qui oblige à importer du combustible. Cette situation n’est pas nouvelle mais les sanctions américaines, la crise économique et les limitations de liquidités de l’Etat, en raison du niveau historiquement bas du cours du pétrole rendent difficile l’achat de carburant à l’étranger[2]. Avec la pandémie, le problème devient très grave.
[1] Site web Opération Paix
[2] https://observers.france24.com/fr/20200601-venezuela-penurie-essence-historique-queue-carburant
Dans ce contexte fortement dégradé, le Venezuela a été un des premiers pays de l’Amérique Latine à imposer le confinement comme mesure de prévention contre le coronavirus. Comme la plupart des pays de la région, le Venezuela fait face au dilemme de la lutte contre la COVID-19 et l’activation de l’appareil productif.
Chronologie des mesures :
[1] OCHA. Venezuela : Plan intersectoriel de préparation et de prise en charge COVID-19. Avril 2020 https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/ven_covid-19_plan_intersectorial_2a_edicion_04102020.pdf
https://covid19.patria.org.ve/estadisticas-venezuela/ - 22/06/2020
Le conflit qui déchire le pays se retrouve dans les déclarations des uns et des autres sur l’avancée de la pandémie dans le pays.
[1] https://www.abc.es/internacional/abci-diosdado-cabello-ordena-perseguir-academicos-venezolanos-revelar-cifras-covid-19-202005141739_noticia.html
Quel est votre opinion sur l’accord signé entre le Ministère de la santé, l’Assemblée Nationale et l’OPS ?
L’accord signé entre l’équipe technique de la Commission de l’aide humanitaire de l’Assemblée Nationale et le Ministère de la Santé du Venezuela pour la gestion conjointe avec l’Organisation Panaméricaine de la Santé (OPS) de la réponse à la COVID-19, est une très bonne nouvelle. Notre reconnaissance pour l’avoir rendu possible. Nous savons que la conclusion de cet accord a été un processus long et complexe, mais nous sommes convaincus que, s’il est mis en œuvre dans des conditions favorables au développement des lignes prioritaires, il débouchera sur des mesures visant à répondre aux besoins de la population et à protéger le personnel de santé.
L’accord intervient également lorsqu’il est probable que la propagation du coronavirus au Venezuela aura un schéma similaire à celui d’autres pays de la région, une croissance progressive des cas qui, avec les mesures appropriées, diminueront également progressivement des semaines plus tard.
Quels enjeux dans la gestion de pandémie au Venezuela aujourd’hui ?
Il est impératif de renforcer la confiance de la population dans la gestion du virus, de réduire la peur et de promouvoir des mesures de prévention.
La population fait face à des situations de grave précarité et sort dans la rue quotidiennement en général par nécessité, et non par irresponsabilité. Créer la confiance implique de rapporter sur la base de preuves scientifiques : rapporter que plus de 80% des personnes qui ont contracté le virus sont asymptomatiques ou ont des symptômes modérés et les dépassent à la maison, et faire aussi savoir qu’il y a des personnes vulnérables qui peuvent se compliquer même sévèrement, et qu’il faut les protéger, en comprenant qu’il n’est pas facile pour la plupart de les isoler par les conditions de logement.
L’État est chargé de fournir les moyens d’accéder à des moyens et matériel de prévention tels que des masques, du savon, de l’eau, du gaz, de l’électricité, de l’essence et du transport, et des conditions qui contribuent à éviter les foules. Le manque d’accès oblige la plupart des gens à sortir tous les jours. Dans ces circonstances, au lieu de "distance sociale", nous devons promouvoir des mesures d’éloignement physique préventif, mais d’une grande empathie et proximité sociale, aider les personnes les plus vulnérables à se protéger. Ce sont des temps de responsabilité et de solidarité.
Non à la stigmatisation ni à la discrimination.
Le moment est également venu d’exiger une gestion adéquate de la riposte à la pandémie : la stigmatisation et la discrimination doivent cesser immédiatement. Ces deux pratiques ont été à l’origine des pires dommages causés par le VIH-sida. Toutes les personnes valent en elles-mêmes. Stigmatiser les personnes qui rentrent des pays de la région les plus touchés par la COVID et les soumettre à des traitements discriminatoires et vexatoires dans les lieux d’accueil peut conduire beaucoup de personnes à préférer des routes de retour telles que les "Trochas", qui les exposent à de plus grands risques.
Stigmatiser le personnel de santé, ceux qui partent travailler et qui n’ont pas les moyens de se procurer des changements quotidiens de masques ou de les réutiliser, ce n’est pas la réponse. Il incombe à l’État, au Ministère de la santé, de fournir les équipements et les ustensiles de protection personnelle
Il est urgent de progresser sur la voie de l’accord avec le Programme alimentaire mondial
Nous sommes face à une situation d’urgence humanitaire au sens large, pas seulement dans le domaine de la santé, qui exige donc des réponses globales, avec la participation d’acteurs divers, nationaux et internationaux. Les autorités doivent soutenir les équipes techniques, veiller à ce qu’elles soient en mesure d’informer la population de la situation en matière de santé, d’alimentation et de services, et enquêter sur les faits de criminalisation de ceux qui signalent ou exigent des conditions minimales de travail et les sanctionner.
Propos exprimés sur @fjreyna le 3 juin 2020, autorisé à publier. Traduction : Elizabeth FLORES PAREDES
Même si on pourrait citer un grand nombre d’exemples d’initiatives citoyennes pour faire face à la pandémie au Venezuela, le cas des associations Médecins Unis de Venezuela – France, Santé pour le Venezuela et Meals4Hope est emblématique. Grâce à la composition de ses membres issus du secteur médical et sanitaire, ces organisations jouent un rôle important dans la compréhension de l’épidémie, la prévention et le partage d’information entre les expériences internationales et les médecins au pays.
Ils ont uni leurs forces et leur expertise afin de lever des fonds pour fournir du matériel médical préventif à quatre grands hôpitaux situés dans les régions de Mérida, Acarigua et Maracaibo. Grâce aux 2000 € recueillis depuis mars à ce jour, 2250 gants, 1850 masques, 32 litres de gel hydro-alcoolique, 50 robes, 150 casquettes de chirurgien et 50 couvre-bottes ont été achetés et distribués sur place pour répondre aux urgences pandémiques. Ce matériel servira non seulement les professionnels de la santé qui opèrent dans le service d'hospitalisation, mais protégera également le personnel de transfert et d'assainissement ainsi que les patients infectés qui arrivent dans les centres de santé dépourvus de matériel de biosécurité.
Réception du matériel pour prévenir la contagion de la COVID-19 au Venezuela. Juin 2019. MUV-France et Santé pour Venezuela
Au niveau local cette diaspora souhaite aussi soutenir les initiatives de solidarités isolées qui ont vu le jour dans le pays même, comme « Le Plan bon voisin» dans un bidonville de Caracas, la capitale, qui distribue des repas aux personnes âgées isolées. Ce plan est venu d’une initiative privée née en mars 2020 avec la détection des premiers cas de Covid-19 au Venezuela, … « A moto, à vélo et en voiture, les douze volontaires distribuent chaque semaine 500 repas à environ 1.000 personnes âgées… »[1].
Les associations de la communauté vénézuélienne en France lancent un appel à la solidarité pour affronter le coronavirus au Venezuela
Mais le souhait de ces acteurs est de pouvoir agir avec plus d’impact. Dans ce contexte, les associations de la communauté vénézuélienne en France se sont concertées afin d’attirer l’attention des autorités françaises et européennes sur le cas du Venezuela. Dans ce sens, un communiqué a été rédigé et publié le 24 avril 2020 pour demander le soutien matériel et les médiations nécessaires à l’obtention de :
A ce jour, un premier accord entre le Ministère du pouvoir populaire pour la santé, l’équipe de conseil (equipo de asesoramiento) sur la santé de l’Assemblée nationale présidé par Juan Guaidó et l’Organisation Panaméricaine de la Santé pour affronter la COVID-19 a eu lieu[2]. Cet accord fait partie des demandes formulées par le communiqué et a été fortement salué par différents acteurs humanitaires et de la solidarité internationale[3].
C’est à partir de cette action conjointe que l’idée de la création d’une Fédération d’associations la communauté vénézuélienne en France est née. L’objectif est de mutualiser les actions de solidarité, de diffusion de la culture vénézuélienne en France et de la défense et promotion des droits humains au Venezuela. Idée saluée par le FORIM qui non seulement a soutenu cette première initiative, mais qui s’est engagée à accompagner la création de cette fédération. Cette diaspora active, organisée et engagée souhaite devenir un acteur clé lors des espaces de dialogue et de négociations en faveur de la construction d’une solution pacifique à la situation de crise de notre pays.
Nous vous invitons à connaître et rejoindre notre appel de solidarité en suivant le lien: www.fedeassoven.com
[1] Au Venezuela, la survie en période de pandémie tente de s'organiser : eunonews.com – 10/05/2020
[2] https://www.lemonde.fr/international/article/2020/06/04/au-venezuela-un-accord-inedit-entre-maduro-et-guaido-pour-lutter-contre-le-virus_6041734_3210.html
[3] https://www.breakingnews.fr/international/borrell-applaudit-laccord-entre-maduro-et-guaido-et-souligne-que-le-dialogue-est-fondamental-pour-le-venezuela-510553.html
Chronique rédigée par Elizabeth FLORES PAREDES – Sociologue et PhD en démographie. Chargée de mission « Etudes, capitalisation et exploitation des données » au FORIM et Jenny QUINTIN – Enseignante. Co-présidente de l’Association La Souffle et La Flamme – Lauréate PRA/OSIM 2019
Comité de rédaction : Chadia Arab, Benoit Mayaux, Jacques Ould Aoudia, Patrick Rakotomalala
Mise en forme et communication : Randa Chekroun, Pierangela Fontana
Les propos contenus dans la présente publication n’engagent que leurs auteur.e.s